thLe Seigneur nous envoie le feu lorsqu’il veut purifier. Il a essayé l’eau, ce fut un désastre. Bruce HOLBERT

Au fin fond du Kentucky pauvre et arriéré, la survie dépend du trafic de drogue. Aussi l’affreux Mister Gruel prend-il fort mal la disparition de Fleece, dont la voiture carbonisée vient d’être découverte. Non qu’il apprécie particulièrement le garçon, mais celui-ci transportait pour lui une imposante quantité de marijuana. Pressé par le  dealer de retrouver Fleece, le jeune Cole s’embarque dans une quête qui tourne à la descente aux enfers : la piste de son frère passe par de biens déplaisantes rencontres et par l’exploitation de contrées maléfiques. Mais surtout, elle confronte Cole à des vérités familiales qui chavirent sa vision du monde. Une ballade ténébreuse sur l’incontournable route du Mal.

Mr Donald Ray POLLOCK, lui même a salué l’excellence de ce roman noir. On se rappellera longtemps des protagonistes de cette tragédie. Cole, le héros christique, voué à l’expiation, sans plus d’avenir que de passé. Lyda, qui a vendu son âme et sa vie au diable Mister Gruel. Mister Gruel, impotent dont le corps part en morceaux à force d’amputations qui règne en maitre sur ce comté abandonné par la loi et Dieu. Ponder qui souhaite s’imposer comme l’image de Dieu dans cette communauté, prêt à tout pour fonder son Eglise, même à s’allier au Diable et lui offrir l’agneau sacrificiel en la personne de… Sans doute le personnage le plus haïssable.

Arley Noe, l’homme à la peau bleue, intraitable homme d’affaires, sa violence est un langage qui ne mérite aucune réponse. Grady, l’homme de main sans cervelle. Mule et sa caisse à outils.
Et pleins d’autres. Mais surtout Shady, adolescente un peu délurée qui aurait pu représenter une lueur d’espoir dans ce paysage définitivement corrompu, qui vivra des rêves par procuration, parce que chez ces gens là Monsieur on a les moyens des rêves des autres ou on va au Diable. 

La beauté du texte m’a laissé pantois, la violence du récit m’a séché, le message m’a empêché de dormir plusieurs nuits après cette lecture. J’ai revisité longtemps cette danse macabre de mise à mort à laquelle s’adonnent Arley Noe et Mule dans un balais morbide autour des outils.
Ils font leur boulot avec élégance et détermination, la mort viendra. 

C’est magnifique et dense, oppressant, et ça vous lâche pas.