jennyLes ruses et les machinations ténébreuses ont été imaginées par les hommes pour venir en aide à leur lâcheté. Euripide

Cayucos, Californie. Une villa au bord du pacifique. Un fugitif désespéré se confie. Dans la baignoire à l’étage, le cadavre d’une femme obèse. Le moment est venu pour l’homme de raconter son histoire.

Quelques mois plus tôt…Après la disparition de son épouse, le journaliste Bradley Hayden, détruit, s’étourdit dans des liaisons sans lendemain via un site de rencontres. Un jour se présente une femme qui ne correspond en rien à la description qu’elle a faite d’elle.

Jenny, 300 livres, QI redoutable, lui montre une vidéo de son épouse. April est en vie. Elle ne le restera que s’il lui obéit en tout. Dès lors, Bradley est contraint de suivre Jenny dans une équipée meurtrière. Qui est vraiment Jenny ? A-t-elle choisi April au hasard ? Bradley pourra-t-il retrouver sa femme à temps ?

Entre passé et présent, scandales politiques et cavale meurtrière, déserts brûlants et cités labyrinthiques, un terrible compte à rebours est enclenché, aux portes de la folie. Présenté comme ça, c’est un thriller. Halte là ! Tout faux ! En tous les cas, pas au sens commun de l’appellation. C’est beaucoup plus compliqué que ça. C’est le récit de dix ans de la vie d’un homme qui n’est plus sûr que ce soit vraiment la sienne. Voyons un peu les personnages.

Bradley est un homme sans envergure, sans désir profond, un abandonnique, son père est parti avec un homme et sa mère avec Alzheimer. Même sa femme qui le plus souvent se refuse à lui va disparaître un beau jour. Bradley va alors abuser des anxiolytiques et des antidépresseurs. Et Bradley va perdre son emploi. Et Bradley va se réfugier dans une hyperactivité sexuelle via un site de rencontre. Il va alors rencontrer Jenny.

Jenny est monstrueuse non seulement par son obésité mais par son appétit sexuel démesuré, une “bouffeuse d’homme” qui va laisser Bradley exsangue, KO avant de l’emmener régler des comptes à travers le pays car il faut aussi tuer pour apaiser Jenny.

Il y a Ron le détective privé paranoïaque, poursuivi par les adeptes d’une secte qui vit dans le désert sous la coupe d’un chaman sans âge Samuel Yogaran. Ce sont les Sons of Sam. Tout ce que sait Ron c’est qu’ils enlèvent des femmes et qu’ils sont très proche des politiques au point que même le FBI rechigne à enquêter.

Il y a Renshaw, psychiatre qui a interné Bradley, l’a plongé dans un sommeil profond pendant des mois et qui lui affirme à son réveil que tout ce que Bradley pense avoir vécu n’est en fait que des souvenirs suggérés pour traiter son incompétence à vivre.

Il y a April, l’épouse de Bradley qui disparaîtra après nous avoir montrer à quel point elle pouvait être insupportable, pour ne réapparaître que sous forme de photos ou de vidéo. Elle est nue, attachée sur une chaise et nous assistons à sa longue agonie.

La surprise viendra du changement dans les relations entre Jenny et Bradley, une connivence, des confidences et pourquoi pas une ombre d’amour. Il faudra à Bradley refaire le chemin en arrière, détisser les liens qui réunissent tous les protagonistes de cette histoire sur 10 ans, revenir vers ses origines, tuer mais pour son propre compte et regarder mourir.

C’est écrit d’une main de maître, le récit est complexe de par sa construction et par la paranoïa et la schizophrénie qui sous-tendent l’intrigue. A priori aucun des personnages de ce roman ne mérite l’affection du lecteur, et c’est là où Fabrice COLIN est fort car tout doucement se glisse une empathie pour au moins deux d’entre eux. J’ai été conquis, mais j’ai aussi été vaincu comme après une séance de sexe avec Jenny, ma lecture m’a laissé KO.