L’assassinat d’un ancien patti issu de la communauté yéniche devenu un industriel en vue va entraîner le commandant Farel de la BRB dans un maelström international où des personnagesinattendus vont faire surgir les aspects les plus sombres de la nature humaine : officier militaire,manouche, chaman, ministre en exercice, avocat international, mafieux de l’Est… Comme dans latragédie grecque, la fatalité accablera les hommes, les habitera et les détruira. Personne ne sera épargné, pas même les héros qui devront payer le prix fort. Prévarications,trahisons, meurtres, attentats, c’est dans ce climat de guerre que Farel va être touché au plusprofond de sa chair !
Il y a deux auteurs lyonnais que j’affectionne particulièrement dans la catégorie « Polar », ce sont Jacques MORIZE et André BLANC, non parce qu’ils sont lyonnais mais parce que la toile de fond de leurs polars est la ville de Lyon et que je m’y retrouve comme chez moi. Mais foin de chauvinisme provinciale ! André BLANC sculpte des polars musclés ancrés dans les méandres des malversations politiques, des engrenages économiques malsains. Un peu à la manière d’un Olivier Marchal, il scrute ce qu’il y a de plus dégueulasse dans les rouages de notre société et attention c’est une mine et aussi un terrain miné. Ici, pas de remords, et encore moins d’humour, tout est excessivement sérieux, il y a mort d’homme, et dans chacun de ses romans la fatuité l’emporte sur la vie humaine. Préserver son statut, sa fortune, sa réputation de grand bandit ou d’édile exemplaire et c’est à ce prix qu’il y a des hommes qui tombent, Farel en fera la douloureuse expérience (moi aussi puisque je n’ai pas pardonné à André d’avoir fait disparaître un de ses personnages).
Un dernier mot pour la fin : lisez la collection Farel, tous chez JIGAL, mais lisez les dans l’ordre de parution vous en aurez encore plus de satisfaction.
A la suite d’un drame familial, Céline, professeur des écoles, débarque dans une nouvelle ville. Seule avec son ado de fils et son chien, sa vie est devenue un combat, contre son passé, contre les pressions familiales. Pourtant elle s’accroche, sa planche de salut ? Son travail. Ce fameux « pari éducabilité » qui la fait tenir. Son métier prend la dimension d’une mission. Dans ce quartier populaire des Murailles, la tâche est immense. Sa classe, ses nouveaux élèves, des « grands » de Cours moyen, sont frappés par le déterminismesocial et l’échec scolaire. Puis il y a ce gosse étrange, Gary.
Ce roman est un gouffre, un gouffre pour le lecteur qui va vivre une expérience étouffante, un gouffre dans lequel rentre une enseignante déjà fragilisée par sa vie personnelle et qui devra s’affronter à une chute vertigineuse : perte de ses repères, de son éthique, la confrontation de l’humanité et de la sauvagerie…mais y a-t-il encore une once d’humanité dans ces zones dévastées par la catastrophe sociale envahissante, la paupérisation, la haine fruit de la rancoeur, la paranoïa qui s’installe face au déni des instances politiques. Ce roman est comme une bombe, un condensé de tristesse et de violence sous-jascente, ça va pêter mais quand et comment ? C’est noir de chez noir, l’auteur comme à son habitude va droit au but, une écriture précise, aucuns détours, une claque dans la gueule presqu’à chaque page pour aboutir à la fin à un KO debout. J’ai cru mourir étouffé et l’éclat de violence à la fin du roman est salvateur mais on ne peut pas le cautionner, il y a comme un sursaut de morale qui voudrait que nous le condamnions, alors que c’est là que j’ai repris mon souffle car enfin un auteur parlait de ce que j’ai parfois désirer de faire dans des situations extrêmes et de toute ma honte d’avoir eu cette envahissement, car il « fallait » bien assumer les « difficultés », j’avais choisi mon métier, mais pas choisi que ma structure professionnelle m’abandonne.
Plusieurs samedis d’affilée, alors que tous les servicesde police de France sont mobilisés par les manifestations des gilets jaunes, de meurtres sont commis dans les beaux quartiers de Paris. Cela pourrait être l’œuvre d’un déséquilibré qui aurait poussé jusqu’à la vengeance les revendications de justice sociale, mais le commandant Jean-Yves Le Guen n’y croit pas. Avec son adjoint, le capitaine Patriziu Agostini, ils jouent contre la montre. Car l’idée d’un « meurtrier gilet jaune » menace de faire l’objet de récupérations politiques qui ne feraient qu’empirer la situation – et le prochain samedi de protestations se rapproche …
Un polar d’actualité mêlant revendications sociales et vengeance personnelle – sur fond de Paris en étatd’urgence
Tout d’abord deux choses : le véritable personnage principal c’est Adeline, ce qui explique mon choix d’illustration musicale, c’est elle qui est au centre de tout et qui après avoir lutté contre la folie, avoir subie la barbarie, a baissé les bras, appuyé son front à la fenêtre, les yeux pleins de larmes pour contempler un cield’hiver qui ne laissera plus jamais passer le soleil. Gabriel au nom prédestiné est l’archange vengeur qui lui aussi, son oeuvre achevée regardera par la fenêtre dans la même direction qu’Adeline.
L’intrigue policière est pour moi un argument de roman, le contexte social un alibi pour justifier que Gabriel ne tombe pas dans les filets de la police. Tout ceci est une articulation du récit. Moi, je me suis posé la question du pourquoi, pas du comment j’ai donc préférer suivre Gabriel que Le Guen,j’ai donc préférer ressentir l’émoi à chaque visite de Gabriel à Adeline qu’à la progression d’une enquête sur fond de troubles sociaux.
Comme d’habitude Jean-Luc Bizien développe une écriture fluide, cette fois sous une forme qu’on a moinsl’habitude de le voir aborder, encore une corde à son arc, cet auteur « touche à tout » qui excelle pour ma part dans le « hard-boiled », mais après lecture de « Et puis mourir » aussi dans un monde plus intimiste.
Par une nuit de décembre, une macabre disparition est signalée à la maternité de l’hôpital. La direction demande à son personnel de ne rien dire : il en va de la réputation de l’établissement. Les années passent, le secret est enterré. Pourtant, dix-huit ans plus tard, le destin s’en mêle quand, après une terrible découverte, Caroline fouille dans le passé… c’est incompréhensible… ça ne « peut » pas être.
Caroline et Augusta, deux femmes que tout oppose. En apparence… Que s’est-il passé qui disloque leur vie et ternisse leur bonheur ? Jusqu’où peut-on aller dans le renoncement, par amour pour une mère, par amour pour un fils ? Il est des rencontres qui bouleversent nos silences. Peut-être courons-nous après l’amour sans en donner assez ?
Connaissez-vous Didier DECOIN ? Sans doute, l’auteur de John l’Enfer Goncourt 1977. Mais le connaissez-vous comme l’auteur de La Femme de chambre du Titanic ou encore de La Promeneuse d’Oiseaux ?
Je vous parle de Didier DECOIN car j’ai trouvé une grande similitude d’écriture, de ton, de souplesse du langage avec Bénédicte ROUSSET. Celles qui se taisentest un roman intemporel, pour tout dire, lors de ma lecture je me suis inventé un monde « début du siècle XX », j’ai plongé dans cette atmosphère et ne m’en suis pas séparé tout du long des 346 pages que compte ce roman.
Essayez d’entrer en guerre avec une femme qui a perdu un enfant, vous verrez : ce qui vous sépare est plus mince que ce qui vous rassemble.
A elle seule cette phrase pourrait à la fois résumer le livre et aussi bien illustrer le ton du récit qui est aussi cruel que doux. On se laisse promener par Bénédicte ROUSSET avec ravissement grâce à sa délicatesse dans cette histoire demensonges, de non-dits et d’amour impossible ni celui d’un fils pour sa mère ni celui d’une femme pour un homme. Le silence fait parfois des ravages, mais après tout on peut s’interroger : toutes les vérités sont-elles bonnes àdire et un secret doit-il rester secret ?
Quid de Jean et d’Isaac, ces deux enfants nés le même jour, dans la même maternité de deux mères que toutoppose. Caroline abandonnée par son mari, réduite à faire des ménages et un peu dame de compagnie pour Augusta, femme aisée dont le luxe consiste à une oisiveté et un ennui chronique qui frôle la dépression. La première est une femme dépassée par la vie, vouée aux gémonies du voisinage, la seconde, une femme autoritaire et une mère qui n’épargne rien à sa progéniture pour satisfaire ses propres désirs et nous le comprendrons plus tard, son besoin de rédemption. Jean se devra de rentrer dans les ordres et Isaac mourra. Mais il est des secrets même les mieux enfouis qui peuvent resurgir.
C’est un roman très fort, parfaitement maitrisé sur la rencontre de l’amour, de la misère, du mystère et dumensonge.
LA TUPINA, à Bordeaux Jamais un restaurant n’aura si bien servi la cause du goût juste Périco LEGASSE in Marianne N°1276 du 27 Août 2021
D’abord la forme, un manuel de recettes de cuisines qui chaque fois trouvent leur place dans le récit et aussi une sorte de best of du polar grinçant, imaginatif. Les deux se conjuguant comme s’il était impossible que l’un manque à l’autre, pour tenir cette sauce. Puis le fond, un polar classique qui selon moi a eu le bon goût (vous voyez on y revient) de s’inscrire dans les années 70, parce que ces années là étaient la porte ouverte au plein emploi, que des cris de liberté avaient brisés quelques tabous et que du coup il n’y a pas d’étonnement à trouver un Aboubacar dégotter un emploi, faire preuve de son art de découpeur et mettre en scène son homosexualité, c’est dans l’air du temps même si par réflexe sociétal se manifestent les fachos, les casseurs de pédés et les profiteurs de tous bords.
N’empêche, la réussite a un prix, le maintien de son rang dans la société a un prix, mais pas le même suivant que l’on soit riche ou bien portant, noir ou blanc, homo ou hétéro, ça se déguste sans faim, au fil des pages, au fil des recettes, avec toujours à l’esprit le P….. de bonheur qu’on du avoir nos deux auteurs à écrire ce manuel irrévérencieux en forme de polar.
Salvatore Bonato est un homme prudent et matois qui a toujours géré sa vie en bon père de famille. Mais est-il possible d’en être un quand on est le comptable du terrorisme et que l’on vient d’en détourner les fonds ? Devant lemonstre qu’il a réveillé, il choisit de se placer sous la protection de la police, accepte de livrer ses secrets, mais pose une condition : que Ciara McMurphy recueille sa confession. C’est aussi lui qui impose l’endroit de la rencontre : Inishbofin, une île au large des côtes du Connemara. Inishbofin, c’est l’île de la vieille femme et de sa vache blanche. Dans la légende celtique, quand elles émergent du brouillard et errent sur les plages de galets, c’est pour annoncer undésastre. Et pour Ciara, c’est un mauvais souvenir. Quand elle avait quatre ans, c’est sur ce caillou perdu en face de lapointe d’Aughrus que sa mère s’est noyée. Pourquoi l’Italien a-t-il décidé de se mettre en scène là-bas ? Quelle idée a-t-il en tête ? Comment se comporte une truite vorace devant les ailes diaphanes d’une May Fly ?
« Chez Coquet, la dent est carnassière, la pensée noire, mais le cœur est ouvert attiré par la lumière chaleureuse del’âtre où la tourbe se consume. »Nyctalope
« Quelle écriture et quelle histoire ! Une plume inspirée et un style virevoltant… Un passionnant roman ! « Whoozone
J’étais dans une bulle, le ciel était bleu, les piafs jamais gazouillaient et je prenais un pied d’enfer à bouquiner, àtaquiner la fario et à enchaîner les orgasmes. Comme Culann est parti depuis plus de trois semaine, je suis redevenue ce que j’étais : une castratrice de médiocres jonglant avec les balles d’une probable déprime– Ciara
Avec « L’aigle des tourbières » nous avons quitté Ciara suffisamment en colère après le massacre de Ballinaleama pour déposer sa démission de la garda, elle a failli perdre la vie, a été la témoin d’atrocités, alors maintenant elle veut qu’on lui foute la paix, qu’elle puisse bouquiner du Sam Millar, préparer ses may fly’s pour aller pêcher la truite et rêver du grand amour. Mais une certaine Cobra va venir rompre ce semblant d’apaisement avec une proposition qu’elle ne peut pas refuser,integrer la spécial- branch de la garda pour une mission temporaire à hauts risques. Ciara était en colère mais là sa colère va décupler face à un personnage énigmatique d’un trésorier sous couverture etprotection conscient de la fin qui l’attend et veut la repousser en ne divulguant ses informations qu’au compte-goutte, tandis qu’inexorablement, dans un cortège de feu, de sang arrivent les tueurs des mafias qui alimentent les réseaux terroristes. La vieille femme et sa vache blanche peuvent se montrer.
Gérard COQUET a passé la surmultipliée, ça sent la poudre, ça flingue à tout-va. Inishbofin est une île, donc un endroit isolé, on peut donc s’y entretuer sans complexes, surtout quand les commanditaires se pavanent dans leurs palais en Bosnie à l’image de Joniar Duraku. La cruauté est de mise, à la hauteur des enjeux. C’est donc avec une variation de style que l’auteur présente ce nouvel opus. Non qu’il renonce aux descriptions depaysages ou d’ambiance, mais il raccourcit le format, il met du nerfs dans ses propos et se rapproche du style hard-boiled, personnages typés, violence omniprésente, un peu à la manière d’un Walter Hill au cinéma ou d’un Stephen Hunter en littérature, et ça lui va très très bien.
Ce roman a été sélectionné pour le Prix Dora-Suarez 2021
De jeunes garçons sont enlevés, puis réapparaissent indemnes, enveloppés d’une couverture de survie. Sylvie,infirmière un peu borderline, est persuadée que le monstre impuni qui l’a terrorisée durant son enfance est l’auteur de ces rapts. Elle pressent l’imminence d’autres drames, d’autres morts. Près du lac où fut retrouvée la première jeunevictime, vingt ans auparavant, des cadavres très récents de salamandres et de vipères sacrifiés sont découverts sur un étrange autel, tandis qu’un autre gamin disparaît…
Un polar qui penche vers le thriller. Des dialogues savoureux, des retournements de situations astucieux, une tension psychologique parfaitement maîtrisée. Saint-Étienne et les monts du Forez. Un coin riche en histoires de sorcelleries et d’amours chaotiques.
Un enquêteur séduisant, très télévisuel, commandant de police parisien récemment arrivé dans le département, qui sort de l’ordinaire puisqu’éternellement vêtu d’improbables chemises à jabot
Sylvie Chotant, infirmière, est au centre de ce roman, tout tourne autour d’elle mais aussi tout tourne à l’intérieur d’elle, Sylvie Chotant, infirmière, est une femme extrêmement perturbée… traumatisme de son enfance ? paranoïa ?
Et puis bien sûr les inévitables secrets de famille quand on sait que Sylvie a été enlevée et séquestrée quand elle était enfant et que personne n’a jamais pu identifier le ravisseur, que les soupçons se sont portés sur les proches.
Maintenant ça recommence, on enlève des enfants que l’on retrouve indemnes un peu plus tard, mais il y a aussi ceux qui ont été enlevés et qui sont morts.
Sylvie Chotant a eu un père violent, une mère absente, un oncle complètement cinglé et deux frères à protéger dans un climat social et affectif proche du néant.
Avec tout ça, Daniel MARTINANGE tricote un polar sans temps morts, passionnant de la première à la dernière page etse permet le luxe de nous scotcher avec un dénouement inattendu. Un bonheur de lecture, une écriture vive, beaucoup de dialogues…un régal.
Cela fait vingt ans que Sébastien a quitté Sainte-Geneviève, sa petite ville natale du sud de la France. Trop de démons l’y tourmentaient. Aujourd’hui, comble de l’ironie pour un écrivain, c’est un livre qui le renvoie à ce passé qu’il s’est toujours efforcé d’oublier.
Le Temps d’un été.
Tout dans ce roman, qui s’annonce comme le succès littéraire de l’année, lui fait penser à Julie. Des références troublantes, des anecdotes qu’elle seule connaissait… À tel point qu’il en est persuadé : c’est elle qui l’a écrit.
Julie, son amour d’adolescent.
Celle qui a tant compté.
Mais qui est morte il y a vingt ans, assassinée par un tueur en série
Passionnant de la première à la dernière page. J’adore ce principe du livre dans le livre, à condition que ce soit bien fait et là c’est remarquable. Les deux histoires se croisent, parfois se télescopent, les personnages se retrouvent, les lieux sont les mêmes, ils ontsimplement changé d’orientation, d’hôtel de luxe la demeure est devenue une pension de famille mais les souvenirs restent dans ces murs et l’auteur parsème son récit de multiples indices. La nostalgie saupoudre toutes phrases de ce roman.
Nous assistons à une magnifique démonstration d’un « à la manière de », hommage à la grande dame du crime et sondétective, j’ai nommé Agatha Christie et Hercule Poirôt, les lieux mêmes sont un hommage, très souvent Poirôtenquêtait dans des Hôtels luxueux ou encore des pensions « so british ».
Il y a une part d’enfance, d’adolescence qui ne peut échapper à un oeil aiguisé: cinq amis inséparables comme uncertain « Club des cinq » de Enyd Blyton auquel l’auteur aurait rajouté cette part de sensualité, cet apprentissageamoureux que Enyd Blyton se gardait bien de laisser entrevoir.
Des personnages crédibles, une intrigue menée de main de maître (malgré un final concernant le meurtre de Juliequelque peu prévisible), une écriture souple, aisée. Un réel plaisir de lecture, une vraie réussite.
Le commissaire Stavros Nikopolidis est un électron libre et désabusé, charmeur invétéré, amateur d’ouzo et de rebetiko, au caractère bien trempé et à l’instinct aiguisé. A peine remis de la traque de son ennemi intime, il se retrouve, sur ordre de sa hiérarchie et de Bruxelles, à devoir collaborer avec les Turcs – ennemis jurés des Grecs depuis toujours – en vue d’interpeller en mer Egée un terroriste embarqué dans une caravane de migrants à destination de l’Europe. Mais Dora, coéquipière de Stavros et ancienne des forces spéciales, semble nourrir une rancune tenace envers ce terroriste et Cengiz, ce chef turc de la police côtière qu’on leur a collé aux basques. Traques effrénées, coups fourrés et retournements se succèdent. La rage qui anime Dora va brouiller les cartes… Et c’est sur une partie de tavli que tout va se jouer !
Son éditeur en parle très bien, Stavros est un personnage atypique, s’il n’évoluait pas dans un contexte aussi violent ilpourrait être le Maigret grec, à l’instar de ce dernier, faisant l’ignorant ou le bon élève face à sa hiérarchie, amateur de bonnes chaires, passionné d’énigmes et de hasard, flirtant au gré de l’enquête avec des personnages plus ou moins recommandables. Mais il n’est pas entouré d’inspecteurs aux ordres, prets à se faire engueuler pour un oui ou un non. L’équipe de Stavros ce sont des durs à cuire, des violents. La Grèce n’est pas la France des années 50, c’est un paysmeurtri par une crise économique sans précédant, assailli de toutes parts par les vents migratoires, l’invasion duterrorisme, la création de camps de réfugiés de plus en plus incontrôlables, la rancoeur incessante avec la Turquie.
Alors Stavros devra déjouer une attaque terroriste, il devra faire le ménage au sein de son équipe, se séparer,contraindre d’autres, prendre soin de ce monde défaillant avec un humanisme qui n’appartient qu’à lui, une logiquequi n’appartient qu’à lui et ce fameux jeu du Tavli, redoutable confrontation.
A 22 ans, Sadia a déjà tout connu. La mort de ses parents, la misère des quartiers d’Echirolles. La solitude et la prostitution. Son destin va basculer quand elle devrafaire la mule (voir chronique du 11 septembre 2020 « LA MULE »sur DORA-SUAREZ.COM) pour le compte de trafiquants tenant le marché de la drogue à Grenoble et Echirolles afin de sauver son petit frère Farès. De fille paumée et exploitée par les hommes, Sadia fera face à tous les dangers et mettra un point d’honneur à dominer le haut de cette chaîne alimentaire criminelle. ( voir chronique du 11 septembre 2020 « UPPERCUTS » sur DORA-SUAREZ.COM). Animée d’une rage dévorante, la jeune femme se jettera à corps perdu dans une spirale diabolique. Rien ne lui seraépargné et elle devra naviguer entre violences des cités, grand banditisme Corse, islamisme terroriste ou cartels de drogue marocains.
Les combats d’une femme mêlant vengeances, quête du pouvoir, règlements de comptes et corruptions à tous les étages.
Dans sa dédicace Sandrine DUROCHAT m’écrivait « voila, la boucle est bouclée ». La boucle familiale sans doute, le retour aux sources aux origines, un semblant de paix, des ennemis exterminés ou neutralisés. Mais Sadia trouve refuge presque malgré elle dans le giron de son grand-père qui est un homme puissant, protecteur, vengeur, mais aussi extrêmement menacé, une cible dans le milieu du traffic. Alors peut-elle espérer plus qu’un répit ?
Encore une fois l’auteure nous emmène dans un monde de violences qui prend dans cet ouvrage une tournureapocalyptique, peut être parce que nous quittons les rues des cités avec les petits dealers, les caïds auto-proclamés, lesproxos pour prendre le large vers une mondialisation et toutes ses ramifications mafieuses allant jusqu’au terrorisme international.
En réalité je ne crois pas un instant que nous ne reverrons pas Sadia…mais sans doute est-ce moi qui ne veut pas la quitter. Bravo Sandrine !
Dans un immeuble parisien, les habitants de chaque étage ont leurs sombres secrets…
Paris. Un immeuble ancien avec une cour pavée. Cinq étages. Fin de semaine calme. Si ce n’est que… Que la grosse fête au quatrième chez ces trentenaires bien dans leur époque tourne mal. Qu’au premier, un des deux Lettons de passage dans la capitale a pris un éclat de grenade GLI-F4 dans le dos et saigne comme un bœuf. Que l’homme du deuxième qui a accueilli une sans-papiers ne rêve que de la baiser. Que la belle étrangère sait particulièrement bien calmer les ardeurs des hommes qui se croient tout permis. Que le jeune du cinquième connaît tout des horreurs commises par le salaud du deuxième et qu’il ne va pas en rester là. Que l’importateur de pistaches qui habite au troisième a pris une balle dans la tête. Mais qui pourrait affirmer que dans ce nid de vipères l’amour ne pourrait pas éclore ?
je me permets de citer Emmanuel FLEURY :
« Dans ses romans, Jacques Bablon va toujours à l’essentiel. Dès l’ouverture du polar, l’ambiance est bien là, donnantenvie d’aller plus loin, de lire encore et encore. Avec lui, pas le temps de souffler, on ne lâche pas le livre tant qu’il n’est pas terminé. Des romans noirs dignes des plus grands. » Emmanuel Fleury
L’allégorie est un peu facile et je m’en excuse, mais j’ai dévoré ce roman comme un mille-feuilles, cette pâtisserie si fragile et si complexe à fabriquer car chaque couche ne tient que par l’excellence de la suivante et ainsi de suite. Le rapport est donc tout à fait identifiable entre une succession de couches et une succession d’étages d’un immeuble,le nombre est sensiblement identique, cinq étages et un lien entre chaque…c’est tout l’humour de Jacques BABLON…une goutte d’eau, une fuite d’eau qui va réunir un voisinage parfois discret, voire invisible, mais parfois exubérants, d’autres encore encombrants, et puis toujours dans une telle situation le personnage qui observe tout maisne sait rien, ou plutôt n’en pense pas moins.
Et comme toujours chez Jacques BABLON il y a ce punch d’écriture, des phrases courtes, une construction un peu comme une partie de flipper, on frôle le tilt, le « game over » mais non ! c’est un gros score qui s’affiche. Et puis il y a cet humour sous-jacent, ce sourire à la fois bienveillant et ironique. J’imagine qu’il m’a dit en achevant son écriture « je t’ai bien eu quand même ». Et j’ai adoré.
Alice croyait avoir trouvé la maison de ses rêves... Quand Léo et elle emménagent au Cercle de Finsbury, une résidence haut de gamme en plein Londres, la jeune femme est persuadée de prendre enfin un nouveau départ. Et tant pis si les choses sont allées un peu vite avec Léo et si celui-ci a pris en charge leur emménagement sans véritablement la consulter. La maison est parfaite, la résidence idéale, et les voisins semblent si accueillants ! … Mais ce fut celle de ses pires cauchemars. Lorsqu’Alice apprend que Nina,qui vivait dans la maison avant qu’ils n’emménagent, y a été sauvagement assassinée, le vague sentiment d’insécurité qu’elle ressentait jusqu’alors se transforme en peur, puis en terreur. Une présence étrange semble hanter les murs et ni Léo, qui semble lui cacher beaucoup de choses, ni les voisins, qui consacrent le plus clair de leur temps à s’épier les uns les autres, ne la rassurent. Et puis l’on passe bien trop facilement d’une maison à l’autre, à l’intérieur du Cercle, pour pouvoir y dormir en paix.
Et alors Hitchcock rencontre les « desperates housewives ».
Nous n’avons pas à faire avec une nouvelle venue, B.A.PARIS est une pointure dans sa catégorie qui manie l’art du récit comme peu savent le faire, le structurer… c’est quoi un « cliffhanger », je vous propose un petit cours de rattrapage:
En deux mots
Vieille de près de deux siècles, la technique du cliffhanger, apparue dans les romans-feuilletons du XIXème siècle,consiste à terminer l’épisode ou la saison d’une oeuvre par une fin ouverte, au moment où le suspens est à soncomble. Au sens littéral, « cliffhanger » signifie « suspendu à une falaise ». La première utilisation du mot remonte à un roman de Thomas Hardy publié en 1873, A Pair of Blue Eyes, dans lequel l’écrivain laisse son héros dans cette situationpour le moins périlleuse. Et bien sûr, on n’oublie pas une référence plus contemporaine : celle du film culte avec Sylvester Stallone sorti en 1993. Utilisé en littérature comme au cinéma, le cliffhanger est l’arme fatale des séries, qui donne une irrépressible envie aux téléspectateurs de revenir comme un seul homme pour l’épisode suivant.
Pourquoi c’est important
Aux Etats-Unis, le cliffhanger est devenu une institution pour deux raisons. Il permet d’accrocher l’attention du téléspectateur, de retenir l’audience pour la saison suivante, et il rythme un épisode de série. Sur les networks par exemple (ABC, CBS, NBC, The CW, FOX), un mini-cliffhanger apparaît toutes les 12 minutes, soit la fréquence des diffusions de spots publicitaires. L’écriture en cliffhangers s’est propagée aux chaînes câblées, qui pourtant n’ont pas la contrainte des publicités. Sur un drama de 52 minutes comme Game of Thrones, on compte entre trois et quatrecliffhangers par épisode.
Quelques exemples concrets
Le cliffhanger le plus célèbre, qui a donné ses lettres de noblesse au terme, reste celui de Dallas. Dans le dernierépisode de la saison 3, J.R. Ewing se fait tirer dessus. Tout l’été, une grande campagne de médiatisation « Who shot J.R. ? » fait grand bruit. Des tee-shirts et mug sont vendus avec cette tagline. Le season premiere de la saison 4, diffusé en 1980 après des mois de spéculation, fut suivi par 80 millions de téléspectateurs dans le monde !
Dans les années 2000, le cliffhanger fait toujours recette. De la trappe au fameux flashforward de fin de saison 3 (« We have to go back, Kate. »), la série Lost l’a utilisé avec brio. Alias (le réveil de Sydney amnésique en saison 3), Desperate Housewives ou encore Prison Break ont aussi livré des cliffhangers restés dans les annales.
Et puis il y a ces séries qui se terminent par des cliffhangers devenus involontairement leurs fins, comme V (2009), annulée au bout de deux saisons après un season final épique et sanglant. Résultat : une frustration éternelle pour les fans, qui ne connaîtront jamais la suite. Au rayon comédie, le cliffhanger a aussi été abondamment utilisé par des sictoms telles que Friends ou How I Met Your Mother. Ces séries de potes terminaient souvent leurs saisons par un suspens romantique autour des couples phares Rachel & Ross et Robin & Ted.https://www.youtube.com/embed/fCa-v2CeyY0?rel=0&showinfo=1
Dans ce roman, l’art de l’utilisation du « cliffhanger » est poussé à son paroxysme, tout peut arriver quand vous tournezune page, quand quelqu’une doit rencontrer quelqu’autre, quand le téléphone sonne, quand l’éléctricité s’éteint,quand n’importe quel incident du quotidien survient, une lumière chez les voisins devient un objet de persécution et quand la lumière disparaît c’est pire, car il faut un maximum de paranoïa pour tenter de fuir ou encore rester pour affronter ce qui n’était vraiment pas envisageable.
Abel Séverac fait une mauvaise rencontre dans un escalier du Vieux Lyon, la montée des Chazeaux*. Il se réveille deux jours plus tard a` l’hôpital Édouard-Herriot, incapable de se souvenir de ce qui lui est arrive´. Pratiquement dans le même temps, un enfant est enlevé non loin du cimetière de Loyasse et le cadavre d’une jeune femme est repêche´ dans le Rhône. Pour ne rien arranger, un dangereux truand fraîchement évade´ de la centrale de Clairvaux semble avoir décide´ de venir a` Lyon régler quelques vieux comptes. Les macchabées pleuvent comme grêle en été, ce qui va contraindre Séverac et son équipe à « se sortir les tripes » pour démêler toutes ces affaires ! *Photo de couverture.
Jacques MORIZE durcit le ton avec ce nouvel opus, l’intrigue policière passe au second plan au profit du récit d’une traque sans répit (ou presque) d’un truand prêt à tout, un de ceux qui sèment la mort sur son passage autant les innocents que les passagers collatéraux, avec son physique mi-bucheron-mi-ogre il a tout pour foutre les jetons.
Paradoxe : le traqué est une bête féroce, le traqueur, en l’occurence Séverac apparaît au moins dans la première moitié du livre comme bien mal en point suite à une agression. C’est sans doute ce qui donne ce parfum de « nouveauté » à ce 9ème roman relatant les enquêtes de Séverac (mais pas que, citons en vrac son addiction à la bonne bouffe et aux femmes…), d’ailleurs ses addictions vont être particulièrement mises à mal suite aux séquelles de son agression.
Enfin c’est comme se retrouver avec un vieil ami au restaurant, le vin est bon, la nourriture excellente, la conversation truculente et aussi grave et intelligente qu’il se doit, on se quitte après avoir payé la note, s’être salué d’une poignée de main ou d’une embrassade (attention covid !) et quelque part ce sentiment diffus, incompréhensible que quelque chose a changé.
Ce roman est nominé pour le Prix DORA-SUAREZ 2021.
Parce que force est de constater que l’homme supporte, même le pire, quand il ne peutfaire autrement, qu’il s’adapte pour survivre
Simone GELIN
En l’espace d’un week-end, le quotidien de la ville de Soissons sombre dans le chaos. Les tombes musulmanes de la nécropole dédiée aux soldats de 14-18 sont atrocement profanées et de l’autre côté de la ville, Julia, en convalescence à la suite d’un accident traumatisant, trouve une main sauvagement coupée sur les berges de l’Aisne. L’adjudant Gomulka, gendarme désabusé et proche de la retraite, se voit confier ces deux enquêtes.
Face à la violence et la noirceur de ces crimes, il ne s’opposera pas à ce que le lieutenant Delahaye, surnommé « la Machine », lui prête main forte. Au cœur d’une ville qui porte les stigmates du premier conflit mondial, les deux hommes vont devoir démêler l’écheveau de ces deux affaires, qui n’en formeront peut-être qu’une. « L’invasion s’arrête ici ». Une enquête sombre dans les bas-fonds de notre société
Intelligent cette façon de conduire le récit autour de deux enquêteurs. Elizabeth George dans un de ses cours d’écriture avait préconisé deux manières d’appréhender un roman policier : soit, privilégier l’angle du récit autour des personnages principaux parfois au détriment de la trame; ou encore l’inverse, privilégier le récit et ses argumentaires ou autres rebondissements au détriment de la trame. (je ne suis pas sûr de l’exactitude au mot près des propos de Mme Elizabeth George, je la cite de mémoire et la prie de bien vouloir m’excuser en cas de bévues). Quoi qu’il en soit, Thomas FECCHIO a su manier l’art de conjuguer ces deux principes pour en faire un roman d’une extraordinaire construction, un roman qui s’intéresse à l’humain, flic ou sans papier, deux expressions qui peuvent apparaître antinomiques et pourtant au fil de ce roman se croisent dans leurs questionnement et leurs aspirations.
Tous les personnages se situent au bord d’un fil, marchent sur ce fil qui peut les entrainer dans des décisions irréparables, et puis il y a ceux qui ont déjà dépassé la frontière, sont tombés du mauvais côté du fil ou encore ont pris la décision d’ignorer cette frontière entre le bien et le mal. Il y a les chiens qui selon l’expression sont « traités comme des chiens » (C’est de vous voir me traiter comme un chien enragé qui me fait souffrir. Je voulais juste dire d’être plus sympa avec lui… mais pas le traiter comme un chien.) Et les chiens enragés, les chiens de meute , les hommes qui traitent leurs semblables comme des bêtes, qui n’hésitent pas à les vouer à la mort. Les hommes qui adoptent un enfant comme un chien à la SPA? sans vraiment mesurer les conséquences.
Dans ce roman c’est bien « L’heure des chiens », ceux qui souffrent de n’être que des bêtes dans le regard d’autrui, ceux qui cavalent car c’est dans leur nature de chasser et ceux qui mordent, dépècent leurs proies pour en tirer satisfaction.
Il n’y a pas pire vengeance que ce qui blesse ceux qu’on aime. À moins qu’on ne les tue. Il n’y a pas pire obsession qu’un fantôme qui vous hante. À moins que ce ne soit celui d’un ami.
Il n’y a pas pire crime que de tuer une enfant. À moins de la tuer deux fois.
Un New York sombre et violent, avec des rues comme des canyons dans lesquels la vie se perd et la mort s’engouffre. Avec fracas parfois, comme lorsqu’elle vient saisir une petite fille, retrouvée assassinée, le corps mutilé, au milieu d’un amas d’épaves de voitures. En équilibre précaire, accroupi tout en haut d’une pile de carrosseries déglinguées, Pfiffelmann interroge son partenaire, l’inspecteur Donnelli : » Alors, tu en dis quoi ? » Un début d’enquête somme toute normal. Sauf que » Pfiff » est un fantôme, qui exige lui aussi la vérité sur les circonstances de sa mort. Comme si Donnelli n’avait pas déjà tout son soûl de crimes, d’obsessions et de vengeances. Comme si la ville ne lui avait pas déjà arraché un lourd tribut. Pourtant, une fois par an, New York lui offre aussi un instant magique, lorsque le soleil couchant symétrique et flamboyant du Manhattanhenge prend la 42e rue en parfaite enfilade. Une illumination divine, comme la révélation d’un indice éclaire un crime d’une lumière nouvelle. Avant que tout, la ville comme la vie de Donnelli, ne sombre à nouveau dans la nuit. Un polar noir et puissant, dans une ville que l’on croit connaître mais dont Roy Braverman fait un portrait inédit, aussi tragique et attachant que ses autres personnages, aussi à l’aise dans l’humour que dans le suspense, et porté par une écriture remarquable.
Il y a deux façons d’aborder les romans de Roy BRAVERMAN
Vous plongez dans une nostalgie des polars américains années 80/90 à la manière de« 48 Heures », la série « Deux flics à Miami » ou encore « Cliffhanger » ces fameux polars survitaminés qui laissent flotter l’humour dans les mêmes eaux que la violence.
Ou alors, selon les mêmes références cinématographiques vous plongez chez Walter HILL, chez KITANO, chez Alan PARKER, chez Denis HOPPER.
A la manière de la série « HAPPY » créee par Grant MORRISON, Donnelli a un interlocuteur imaginaire, chez Grant MORRISON il s’agit d’une licorne facétieuse à la manière d’un Jeminy Crickett, chez Roy BRAVERMAN il s’agit d’un fantôme, celui de Pfiffelmann le coéquipier de Donneli tué en mission.
Dans les deux cas, les dialogues sont grinçants, les paroles prononcées sont à la fois des mises en garde, des reproches et des regrets. Roy BRAVERMAN sait construire des dialogues qui sonnent comme des actions et font parfois même encore plus mal. Soyons « léger » et sourions aux interventions de Pfiff et aux situations cocasses que cela engendre, comme nous pouvions sourire à l’apparition de Mardiros le collecteur de dettes dans la trilogie « HUNTER » (l’arménien est précautionneux..) Mais ne sont-ils pas tous les deux des personnages mythiques qui sous des aspects ironiques représentent l’essentiel des remords et des échecs, l’un ne serait-il pas CHARON le collecteur des âmes qui échange de quelques pièces faisaient traverser les morts pour les rivages d’une autre vie, et l’autre ne serait-il pas l’OEIL qui dans la tombe regardait Caïn. Donnelli a beaucoup à se reprocher, sa culpabilité est avérée et avec tout ce qu’il avale il n’est pas étonnant que sa culpabilité s’exprime sous formes hallucinatoires et là plus rien n’est drôle, et comme dans la trilogie HUNTER la tragédie prends le pas sur la forme qui se voudrait quelque peu détachée en face de ce déchainement de violence. Roman NOIR, très noir et ce n’est pas le phénomène « Manhattanenge » qui donnera une clarté et réparera les malheurs dans lesquels cette ville est engluée. Le vice, la souffrance…on s’en fout t’es mort(e), t’es une petite fille un petit garçon, un vieux, une vieille, un branleur, un braqueur, un commerçant, un parent ou tout autre tu ne survivras pas…tu es de la viande morte ou vivante à monnayer.
La guerre, c’est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent et ne se massacrent pas.
Paul VALERY
Eté 1918, la Première Guerre Mondiale touche à sa fin. Ici, on combat. Ailleurs, on négocie la paix. Le capitaine Simon Fleurus est un héros contradictoire. Il s’est couvert de gloire sur les batailles de la Marne, de Verdun mais a désormais droit à une réputation peu flatteuse dans l’armée. En effet, un an auparavant, lors des combats du Chemin des Dames, il a, entre autres, participé aux tribunaux militaires chargés de condamner les mutins. Harassé par ces guerres obscures et souffrant de stress post-traumatique, il sollicite sa mutation, au grand étonnement de son état-major. Ses supérieurs, qui ont apprécié ses capacités d’enquêteur, l’envoient en Algérie française. Dans un bagne de l’armée, en plein désert du Sahara, les cas d’évasion sont particulièrement élevés. Fleurus, accompagné du major Louis Zamberlan, pénètre dans la gueule de l’enfer..
L’horreur justifiée par une autre horreur: la guerre.
« Ce qu’il voit aujourd’hui dépasse sa conception de l’humanité. Abrutis par le soleil, la chaleur, le sable, le vent, ces hommes sont devenus fous. Loin des yeux du front, imprégnés d’un profond sentiment d’impunité, ils se croient tout permis. Pour eux, réduire leurs semblables à une parcelle de néant est devenu un acte d’une extrême banalité. Le symbole de la punition, la preuve même que le cachot n’est pas une solution suffisante. Tant qu’ils recommenceront, ils y auront droit. »
Fût un temps où l’Inquisition agissait au nom de Dieu, menant des êtres qui au nom de la foi en Dieu devaient mourir, expiés leurs péchés de déviances envers la Foi étatique, les menant au bucher au devant du public, ésperant ainsi faire grandir la dévotion du tout un chacun en une grande liesse macabre : « la montée au sacrifice ». En nos temps pas si éloignés l’Etat a conduit en une marche lente une foule d’hommes vers un sacrifice tout aussi indigne, celui d’une rédemption par la souffrance entrainant par là des exactions que personne à l’époque ne voulait nommer au risque de se voire assigner au même sort : « ennemi de la république » ou encore « anarchiste ». A la différence de l’Inquisition, l’institution militaire-républicaine ne donnait que peu d’informations sur ces disparitions, les transformant en peines d’incarcérations pour motifs, le plus souvent d’insubordinations ou de désertions. Les bagnes militaires naissaient.
Avec eux, cet éloignement géographique qui permettait aux proches de ces victimes de justifier l’absence de nouvelles, permettait aussi d’asseoir la colonisation à moindre coût.
Rien ne se perd dans le roman de Guillaume AUDRU, tout ce que je viens d’évoquer et bien d’autres choses qui m’ont sans doute échapper. C’est un roman intense, pesant, infligeant, une douleur à lire.
Il y a bien sûr une intrigue, un récit, des personnages, au passage très bien ancrés dans leurs rôles, mais la réalité de ce récit c’est de nous dire l’Histoire.
AAHHH ! mais quelle horreur Guantanamo crions nous quand nous sommes les héritiers de ce témoignage, seules les méthodes de tortures ont changées et la communication avec.
Où la douleur s’abat subitement sur moi, me fracasse le crâne, lacère la moindre parcelle de mon cœur, me transperce l’âme. Et les larmes m’assaillent. Elles me brûlent les yeux pour finalement me ronger les joues. Et j’ai l’impression de m’effondrer de l’intérieur. Inconnu
La douleur morale est plus cuisante que la douleur physique ; l’ennui, la séparation, sont des maux capables de causer les pires ravages, même chez les personnes les plus plus fortes.” Adrienne MAILLET
En 2019, le New York Time diffuse plus de 400 documents officiels chinois. Ils attestent de l’existence des camps de concentration modernes où sont détenus une partie de la communauté des Ouïghours. Ce non-respect des droits de l’homme est perçu, par certains chercheurs, comme un génocide.
Dans les yeux de la fillette, une supplique hurlante et muette, s’il te plaît, Maman, reviens. Mais Rosine ne peut pas l’entendre, elle est ailleurs, dans un trou noir, la boîte noire, un trou où il n’y a rien. Sandrine COHEN
Il sortit dans la lumière grise et s’arrêta et il vit l’espace d’un bref instant l’absolue vérité du monde. L’implacable obscurité. Du temps en sursis et un monde en sursis et des yeux en sursis pour le pleurer. Cormac McCarthy
Il y a ceux qui dévorent et ceux qui sont dévorés. C’est un bon principe de départ. Et ceux qui dévorent sont-ils plus immoraux que ceux qui sont dévorés ? John Steinbeck
Il n’y a pas de plus tard. Plus tard c’est maintenant. Toutes les choses de grâce et de beauté qui sont chères à notre coeur ont une origine commune dans la douleur. Prennent naissance dans le chagrin et les cendres. Cormac Mac Carthy
Puis vient le jour des révélations de l’Apocalypse, où l’on comprend qu’on est maudit, et misérable, et aveugle, et nu et alors, fantôme funeste et dolent, il ne reste qu’à traverser les cauchemar de cette vie en claquant des dents. Jack Kerouac
Nouvelle de Gérard Coquet, tirée du volume 4 de la collection Dora-Suarez-présente…, Irresponsable ?, ISBN 978-2-913897-63-2, éditions AO – André Odemard 2017. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.
Nouvelle de Jacques Morize, tirée du volume 2 de la collection Dora-Suarez-présente…, À table !, ISBN 978-2-913897-51-9, éditions AO – André Odemard 2016. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.
Viens, m’ont dit les ténèbres, viens avec nous. Mais j’étais faible, je pourrissais et je n’avais même pas la force de m’agenouiller. Ténèbres, leur ais-je répondu, prenez moi la main. Emmenez moi loin de cet endroit. Et les ténèbres m’ont emmené. Denis Lehane
Nouvelle de Ludovic Bouquin, tirée du volume 6 de la collection Dora-Suarez-présente…, Enfantillages, ISBN 978-2-913897-77-9, éditions AO – André Odemard 2018. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.
Nouvelle de James Holin, tirée du volume 5 de la collection Dora-Suarez-présente…, Jusqu’à la lie, ISBN 978-2-913897-67-0, éditions AO – André Odemard 2018. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.
Nouvelle de Gaëlle Perrin-Guillet, tirée du volume 3 de la collection Dora-Suarez-présente…, Au fil de l’eau, ISBN 978-2-913897-54-0, éditions AO – André Odemard 2017. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteure et des éditions AO.
Nouvelle de François Boulay, tirée du volume 1 de la collection Dora-Suarez-présente…, Un Petit Noir, ISBN 978-2-913897-48-9, éditions AO – André Odemard 2016. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.
Nouvelle de Ludovic Francioli, tirée du volume 4 de la collection Dora-Suarez-présente…, Irresponsable ?, ISBN 978-2-913897-63-2, éditions AO – André Odemard 2017. Mise en ligne avec l’aimable autorisation de l’auteur et des éditions AO.